Vers la consécration d’un devoir de vigilance : mythe ou réalité ?

La Chaire L.R. Wilson, le Centre de recherche en droit public de l’Université de Montréal et l’Institut de recherche en droit attractif de l’Université Paris-13 organisent le 24 mars 2016 une journée d’étude franco-québécoise sur le thème du devoir de vigilance.

 

Entrée gratuite mais inscription obligatoire.

Formation d’un dispensateur reconnu aux fins de la formation continue obligatoire du Barreau du Québec pour une durée de 4 heures.

Une attestation de participation valant pour 3 heures de formation juridique sera transmise aux notaires.

 


 

Programme

Propos introductifs

Allocutions de Vincent Gautrais et de Mustapha Mekki

PANEL 1 – DES ACTES

1A – Vigilance et contrat

  • Mustapha Mekki, Professeur à l’Université Paris 13, Directeur de l’IRDA
    Avec les années, le devoir de vigilance a acquis une force et une densité normatives plus importantes. La juridicisation progressive du devoir de vigilance s’est faite au moyen d’un outil privilégié : le contrat. Instrument adapté au phénomène d’internormativité, le contrat entretient avec le devoir de vigilance une relation dialectique car il est tantôt la source d’une obligation de vigilance, tantôt l’effet d’un devoir général de vigilance.
  • Benoit Moore, Professeur à l’Université de Montréal – Titulaire de la chaire Jean-Louis Baudouin en droit civil
    Le devoir de vigilance est entendu comme ayant pour objet la protection, au nom de l’intérêt collectif, de certaines valeurs fondatrices de la collectivité, en l’occurrence la protection de l’environnement et des droits humains et l’éradication de la corruption. Les liens entre le devoir de vigilance et le contrat peuvent être analysés sur un double aspect. D’abord le droit québécois reconnaît dans certaines situations un devoir  de vigilance pouvant éventuellement affecter une partie contractante. Dès lors peut-on, à partir de ces différentes illustrations, soutenir l’existence d’un devoir général de vigilance en droit des contrats québécois ? Ensuite les parties peuvent créer  d’elles-mêmes des obligations de vigilance, notamment en soumettant leurs relations contractuelles à des codes d’éthique. Les enjeux juridiques de ce procédé seront soulevés.

1B – Vigilance et responsabilité civile

  • Nathalie Blanc, Professeure à l’Université Paris 13, Membre de l’IRDA

    Le devoir de vigilance existe-t-il sur internet ? La lecture des textes sur le commerce électronique le laisse penser. Ainsi, les acteurs de l’internet, spécialement les intermédiaires techniques, sont tenus d’un devoir de surveillance du réseau. Mais ce devoir a vu sa portée largement cantonnée par le juge de l’Union européenne. Corollairement, la responsabilité civile des intermédiaires techniques est allégée. Ils ne sont responsables que s’il est démontré qu’ils ont joué un rôle actif de nature à leur conférer une connaissance ou un contrôle des contenus illicites ou encore s’ils n’ont pas réagi promptement pour bloquer l’accès à ces contenus. La liberté de communication prime manifestement en ce domaine.

  • Vincent Gautrais, Professeur à l’Université de Montréal, directeur CRDP, titulaire de la Chaire L.R. Wilson
    Le monde des technologies invite à la reconsidération; l’ampleur des changements est telle, que l’on a invariablement besoin de comparer ce qui est dans l’environnement numérique et ce qui se fait dans le monde analogique. En matière de responsabilité, un premier constat qui s’aperçoit est que le développement du commerce électronique s’est longtemps basé sur une tendance à ne pas responsabiliser outre mesure les acteurs. Ce phénomène fut d’abord constaté auprès des intermédiaires de services qui disposent dans plusieurs juridictions d’une irresponsabilité de principe et une seule obligation de réaction. Il en est de même en matière de sécurité où, au grand dam de plusieurs auteurs (par exemple Bruce Schneier), les entreprises de logiciels parviennent à s’exonérer de toute responsabilité en limitant leur action à la production de « rustines » dont la capacité de corriger les erreurs est sujette à quelques doutes. Pourquoi ce régime spécial, exonérant, aux entreprises du numérique, alors qu’une densification des obligations semblent pouvoir être constatée ailleurs dans l’analogique? Face à ces obligations de diligence, de vigilance, que l’on constate dans plusieurs domaines, il serait peut-être temps que le numérique sorte de l’adolescence.

PANEL 2 – DES ACTEURS 

2A – L’employeur

  • Renée-Claude DrouinProfesseure à l’Université de Montréal
    Le développement du contentieux à l’encontre des entreprises transnationales : quel rôle pour le devoir de vigilance ? C’est sur la base des principes du droit de la responsabilité civile en common law que plusieurs recours ont été intentés dans les dernières années par des victimes de violation des droits fondamentaux à l’encontre des sociétés amirales de grands groupes multinationaux pour des dommages causés dans le cadre des activités de leurs filiales. Des jugements rendus par des tribunaux anglais, néerlandais et canadiens démontrent le rôle fondamental que peut jouer le juge dans l’adaptation des principes juridiques existants afin de reconnaître l’existence d’un devoir de vigilance incombant à une société mère. Cette présentation explore comment le durcissement normatif du devoir de vigilance énoncé dans plusieurs instruments de droit souple pourrait advenir, en-dehors de toute intervention législative, par la voie judiciaire.
  • Laurent Gamet, Maître de conférences (HDR) à l’Université Paris 13, avocat au barreau de Paris
    En droit du travail français, l’obligation de vigilance s’inscrit dans le cadre de la lutte contre le travail illégal. Elle impose au donneur d’ordre de vérifier que son cocontractant emploie de façon régulière la main d’œuvre affectée à la réalisation de la prestation. S’il méconnaît son obligation de vigilance, ou s’il ne tire pas les conséquences de l’incurie de son cocontractant, le bénéficiaire de la prestation effectuée en marge de la légalité est responsable civilement et pénalement, quand bien même il n’est pas l’employeur défaillant. Il assume ainsi la responsabilité de l’entreprise illégale.

2B – Les sociétés

  • Géraldine Goffaux-Callebaut, Professeure à l’Université de Brest
    Le principe de l’autonomie de la personne morale, l’effet relatif des conventions et le droit processuel international limitent la responsabilité des sociétés mères du fait de leurs filiales. Pour les rendre responsables, il existe plusieurs pistes de réforme, notamment l’introduction d’une responsabilité du fait d’autrui lorsqu’une société en contrôle une autre. Pour éviter que les sociétés soient impunies lors de manquements à la législation ou aux engagements sociétaux pris dans des codes d’éthique, le législateur français envisage de mettre en place une obligation de vigilance à la charge des sociétés mères. A ce jour, deux propositions se sont succédées, prévoyant des modalités différentes, mais le législateur ne semble pas pressé d’introduire cet outil dans notre droit.
  • Stéphane RousseauProfesseur à l’Université de Montréal, titulaire de la Chaire en gouvernance et droit des affaires
    La conférence abordera la place du devoir de vigilance en droit des sociétés canadien en regard de la responsabilité des sociétés-mères pour leurs filiales.

2C – Les banques

  • Frédéric BicheronProfesseur à l’Université Paris XII (UPEC), Directeur-adjoint du laboratoire MIL 

    Le banquier est actuellement soumis à un devoir de vigilance accru, lequel s’exerce dans l’intérêt tant de son client (en cas de mouvements de fonds anormaux, de chèque falsifiée…), que de la collectivité (suspicion de blanchiment d’argent…). Toute la difficulté consiste alors à accorder cet essor du devoir de vigilance avec le traditionnel devoir de non-ingérence du banquier dans les affaires de son client

  • Ivan TchotourianProfesseur à l’Université Laval
    Existe-il un devoir de vigilance des institutions financières ? Quelle forme ce devoir de vigilance prend-t-il aujourd’hui ? Alors que le devoir de vigilance est devenu un incontournable du monde juridique, apporter une réponse à cette double question est plus complexe qu’il n’y paraît de prime abord. D’une part, les banques ont une responsabilité qui s’est intensifiée depuis quelques années vis-à-vis de leurs clients et de certaines opérations. Les tribunaux se montrent parfois sévères en imposant aux banques un devoir accru de vigilance. D’autre part, les banques doivent également gérer de nouveaux risques, leur imposant de ce fait une vigilance particulière. Il en va ainsi des risques associés à leur saine gouvernance ou encore, ceux liés à la criminalité financière.

 

Formulaire d’inscription

Inscriptions clôturées.

Ce contenu a été mis à jour le 24 mars 2016 à 13 h 50 min.